Le réalisateur Benedict Andrews a dévoilé ses notes de productions pour Seberg avec Kristen dans le rôle phare de l'actrice américaine Jean Seberg. Il développe l'histoire dans deux synopsis et explique longuement les raisons qui l'ont amené à choisir ce projet et Kristen, sa vision de l'histoire et le tournage.
Traduction faite par le staff de KStew France. Merci de nous créditer avec LIEN si vous la reprenez ailleurs
Synopsis court
Seberg
est inspiré par des événements réels concernant Jean Seberg, star
d'A Bout De Souffle et chouchoute de la nouvelle vague française,
qui, à la fin des années 60, était la cible du FBI de Hoover, à
cause de son engagement politique et romantique avec le défenseur
des droits civiques Hakim Jamal.
Synopsis long
Dans son second long
métrage, le célèbre metteur en scène de théâtre australien
Benedict Andrews propose un thriller noir au cœur d'Hollywood à la
fin des années 60, riche en thèmes modernes et en intrigues
politiques. Il associe des faits et des événements historiques en
une sorte de récit spéculatif basé sur des événements réels
dans la vie de l'actrice Jean Seberg, lorsque son implication dans le
mouvement Black Power la laisse vulnérable à une campagne de
diffamation organisée par le FBI de Hoover.
Lorsque Seberg
commence, Jean (Stewart) est déjà une actrice bien connue et une
icône de style, mais la célébrité n'a pas réussi à satisfaire
son côté inquiet et curieux. Partisane de longue date du mouvement
des droits civiques, Jean est immédiatement attirée par Hakim Jamal
(Mackie), activiste charismatique du mouvement Black Power et leur
relation passe rapidement du politique au romantique. Cet
enchevêtrement et le soutien financier de Jean à divers groupes de
défense des droits civils font d'elle une cible de COINTELPRO, une
opération de surveillance secrète du FBI visant à perturber les
organisations politique.
Récemment recruté par
le FBI, Jack Solomon (O'Connell), un spécialiste de la surveillance
doublé d'une expertise en son, rejoint le bureau régional de L.A et
est associé à un agent plus expérimenté, Carl Kowalski (Vaughn).
Ils réalisent des écoutes téléphoniques au domicile d'Hakim et
Jean pour documenter l'affaire du couple et exposer ses contributions
financières au mouvement. Jack devient son ombre, surveillant 24
heures sur 24, et il est attiré par la présence lumineuse de Jean,
mettant à l'épreuve sa loyauté envers sa jeune femme (Qualley).
Réalisant que des agents
la suivent, enregistrant ses téléphones et ouvrant son courrier,
Jean devient de plus en plus instable. Lorsqu'elle tombe enceinte
alors qu'elle tourne un film au Mexique, le FBI saisit cette occasion
pour l'écraser et discréditer le mouvement en semant une
désinformation scandaleuse qui déchire la famille de Jean et crée
un fossé entre elle et ses passions. Horrifiée par ce résultat et
honteux de cette complicité, Jack se lance dans une mission
salvatrice et de rédemption qui le met brièvement en contact direct
avec Jean. Pour lui, c'est à la fois une confrontation de son
obsession et un tournant moral. Pour elle, c'est une confirmation
qu'elle a été victime d'un système corrompu et un miroir du rôle
qu'elle a joué dans son propre dénouement.
Déclaration du
réalisateur
'Une caméra vous
emprisonne – pas une réflexion déformée dans un miroir, mais une
reproduction critique pure à la loupe' –
Jean Seberg
J'ai découvert Jean
Seberg pour la première fois lorsque mon professeur de français au
collège a projeté A Bout De Souffle de Godard dans notre
classe. J'ai été ébloui. Elle a redéfini ce que la présence et
la vérité signifiaient à l'écran. Ce n'est que plus tard que
j'apprendrai les faits de sa courte et extraordinaire vie et la façon
dont elle a été brûlée par la guerre secrète du FBI contre les
droits civils en Amérique. Comme le personnage de Jeanne d'Arc,
qu'elle a joué dans le film d'Otto Preminger, Jean a traversé le
feu. Après avoir survécu à un accident et une perte, elle a
transformé la volatilité en grâce durement acquise. Son histoire
est toujours urgente, pleine de résonance avec notre propre temps
complexe.
C'est maintenant le
moment idéal pour raconter l'histoire de l'opération illégale
COINTELPRO menée par le FBI contre Jean, l'activiste Hakim Jamel et
le Black Power Movement. Dans ce récit, nous rencontrons, sous forme
germinale, la militarisation de la surveillance par l'Etat à des
fins politiques. Cinquante ans plus tard, l'histoire de Jean reflète
directement notre réalité actuelle : le racisme stupéfiant de
la politique américaine, le défi de séparer la vérité des
mensonges à l'ère des fausses nouvelles et une culture se
surveillance de masse.
Je ne souhaitais pas du
tout faire un biopic conventionnel sur la vie de Jean, pas plus que
je ne voulais faire un paean nostalgique des années 60. Je voulais
me rapprocher de Jean et de ce qui lui était arrivé entre 1968 et
1971. Seberg associe les faits et les documents du FBI dans
une sorte d'histoire spéculative qui explore l'expérience
subjective de Jean. Alors que son engagement politique offre un
aperçu de la lutte pour les droits civiques de l'Amérique de la fin
des années 60, Dorothy, l'épouse d'Hakim, souligne que Jean est
simplement 'une touriste' dans ce monde. Son activisme est compliqué
par des notions de privilège blanc et par ses relations
extraconjugales avec des militants noirs. Ses contributions réelles
étaient relativement modestes – des dons et des collectes de fonds
pour la plupart – et faites en privé. Contrairement à certains de
ses pairs, Jean n'a pas prêché ses convictions et a rarement fait
la une des journaux pour son activisme. Mais elle cherchait à faire
la différence, osant sortir du cadre défini par son industrie et sa
culture, et, pour cela, elle était punie sans pitié et injustement.
Jean n'a pas été la plus grande victime de la campagne COINTELPRO
menée par le FBI et détruite par l'appareil de surveillance de
l'Etat.
En réalisant Seberg,
j'étais profondément conscient des parallèles entre le cinéma et
les mécanismes de surveillance. L'équipement (caméras,
microphones, écrans, etc) est bien entendu similaire, tout comme
l'observation des minuties de la vie. Le cinéma, comme la
surveillance, nous invite à proximité. Nous devenons des voyeurs,
scrutant des espaces normalement cachés et examinant tous les
détails privés, y compris le camp des personnes qu'ils ne peuvent
pas toujours voir. Dans le cas de Jean, cet examen est doublé
puisque nous regardons une actrice, une personne qui vit déjà sa
vie en public, sous le regard de la caméra.
Dans ma carrière de
réalisateur, j'ai eu le privilège de travailler avec des acteurs
extraordinaires. J'ai observé de près comment ils exposent leur vie
aux auditoires. Leur travail consiste à exploiter la matière
première du soi pour créer la vérité sur scène ou à l'écran.
Je suis fasciné par le courage et la vulnérabilité nécessaires
pour exister à la frontière fragile entre le rôle et la vie. Leur
vie privée de Jean, exposée au public à l'écran et violée sans
scrupule par le FBI, constitue le champ de bataille du film.
Le scénario fondamental
de Joe Shrapnel et du scénario d'Anna Waterhouse est de suivre Jean
en parallèle avec l'agent de fiction du FBI, Jack Solomon. Le
frisson et le pouls du cinéma sont l'entrelacement de leurs vies.
Tout au long du film, les deux personnages marchent côte à côte,
inconscients mais sensibles l'un à l'autre. Alors que leurs destins
se rencontrent, Jack devient notre notre substitut, regardant Jean
basculer de très près. Son parcours consiste à examiner notre
propre voyeurisme, notre propre soif cinématographique à mettre à
nu des personnages. Il explore la vie privée de Jean et la ligne de
démarcation entre surveillance, voyeurisme et obsession.
Dans Seberg,
j'avais pour objectif de combiner le couple et la portée épique
d'un thriller de conspiration avec l'intimité brute d'une histoire
d'amour. Pour le langage visuel de la surveillance, je me suis
inspiré de grands films des années 70, dont le chef d'oeuvre de
Coppola, The Conversation, et la trilogie de paranoïa d'Alan
Pakula, Klute, Parallax View et All The President's
Men. Ces films sont sortis à une époque, comme la nôtre, de
crise politique et de bouleversement.
Je voulais filmer
l'histoire de Jean avec une beauté luxueuse et romantique qui
correspondait à son charme et à son enchantement. Cela est évoqué
par la caméra rôdante de Rachel Morrison, les chambres élégantes
de Jahmin Assa, les vêtements exquis de Michael Wilkinson et le
raffinement du montage de Pamela Martin. Nous avons résisté à tous
les clichés d'époque, préférant décrire les différents espaces
que Jean et le FBI traversent avec une beauté lumineuse et hantée.
La solitude spéciale du grand roman de Joan Didion en 1970, Play
As It Lays, était une pierre de touche, de même que le portait
brutal de Gena Rowland représentant une actrice qui se fondait dans
Opening Night de Cassavetes.
Je ne voulais pas d'une
actrice qui imiterait simplement Jean. Les parallèles entre la vie
de Jean et celle de Kristen sont saisissants. Les deux ont été
projetées dans les yeux du public à un jeune âge et ont tous deux
réussi à survivre à l'attention intense des médias. Chacune prend
des risques, possède une altérité lumineuse à l'écran et est
devenue une icône de style. Comme Jean, Kristen a délivré des
performances formidables dans le cinéma français, défiant les
critiques chez elle. Plus important encore, les deux sont des
actrices brutes et instinctives. Ni l'une ni l'autre ne se cache
derrière un masque – elles ne sont tout simplement pas capables de
le simuler. Elles nous demandent de venir les recontrer et de les
rencontrer selon leurs propres conditions.
Seberg
est de l'amour pour Jean …
Benedict Andrews, Reykjavik, août 2019
Benedict Andrews, Reykjavik, août 2019
Source: @Gossipgyal
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