mardi 18 septembre 2018

Lizzie : Interview de Chloë Sevigny avec The Advocate

A l'occasion de la press junket américaine de Lizzie, Chloë Sevigny mentionne Kristen et leur collaboration et parle du développement du projet, des personnages, du tournage et de l'impact de la célèbre histoire de Lizzie Borden dans une interview avec The Advocate. 




Traduction faite par le staff de KStew France. Merci de nous créditer avec LIEN si vous la reprenez ailleurs 

Sevigny et Stewart subvertissent le trope meurtrier lesbien Lizzie

Pendant près d'une heure et demie qui précède le moment notoire où Lizzie Borden a 'pris une hache et donné 40 coups de hache à sa mère' dans le projet passionnel Lizzie de la comédienne Chloë Sevigny, la caméra s'attarde sur elle, cachée derrière les vitres et les barreaux d'une cage d'escaliers. Ces plans télégraphient le fait qu'elle est déjà prisonnière chez elle avec un père misérable et violent et sa femme complice. Au moment où elle entre en prison pour attendre leur procès pour leurs meurtres horribles, c'est le répit du purgatoire qu'était sa vie.

En partie un conte de vengeance et en partie une chanson rédemptrice, Lizzie a pris des années pour la chouchoute du cinéma indépendant Sevigny (Boys Don't Cry, Big Love, Love And Friendship) et le scénariste Bryce Kass pour le porter à l'écran et il a subi plusieurs itérations en cours de route. Mais cette version de la tueuse à la hache de la petite ville de Fall River, dans le Massachussetts, n'a pas pu arriver à un moment plus opportun. Film partageant une lignée avec les films basés sur les crimes homosexuels des années 90 comme Heavenly Creatures et Sister My Sister, Lizzie est une version complètement nouvelle du trope meurtrier lesbien. Le film s'inscrit également dans l'ère de #MeToo, avec Lizzie et sa femme de chambre/amoureuse/co-conspiratrice Bridget (Kristen Stewart) qui dénigrent littéralement la masculinité toxique.

'Je pense qu'elle l'a fait. Oui. Je pense qu'elle a tué', a déclaré Sevigny à The Advocate. Borden a été accusée du meurtre de son père et de sa belle mère en 1892, mais elle a été acquittée parce que le jury masculin ne pouvait pas croire qu'une femme de son rang social était capable d'une telle sauvagerie.

Depuis que Lizzie a été projeté en avant première à Sundance au début de l'année, la scène dans laquelle Lizzie et Bridget se déshabillent a beaucoup fait parler, dépouillant les restrictions vestimentaires de la Nouvelle Angleterre du XIXème siècle pour commettre les meurtres. Avant de matraquer sa belle mère Abby (Fiona Shaw), Lizzie déboutonne sa robe, laisse tomber son corset et en sort toute nue pour conserver ses vêtements. Le réalisateur et enfant prodige de l'horreur Craig William Macneill (The Boy) juxtapose avec brio la scène déshabillée avec un moment plus tôt dans le film dans lequel Bridget attache avec précaution, avec amour, les boutons du corsage de Lizzie en prélude à une relation physique.

Alors que la scène dans laquelle le personnage de Lizzie dénudé joué par Sevigny abaisse la hache à plusieurs reprises sur sa belle mère a déjà été évoquée, il n'est pas moins choquant pour le spectateur de vivre cette libération viscérale avec elle.

'[La scène du meurtre] était en quelque sorte mon idée', dit Sevigny. 'Je pense que le public a mérité ça et Lizzie méritait ça. Je voulais qu'elle supprime ces restrictions sociales – par exemple le corset – et ensuite que cela devienne simplement charnel. Elle était simplement dans l'adrénaline. Est-ce qu'elle pensait qu'elle allait vraiment le faire ? Une fois qu'elle a commencé, elle ne pouvait plus s'arrêter'.

Mais, du moins dans la version de Sevigny, les crimes de Lizzie ne sont pas sans fondement. Célibataire et souvent malade (on dit qu'elle a souffert de crises d'épilepsie), Lizzie vit avec ses parents et sa sœur Emma (Kim Dickens) sous les règles draconiennes de son père, Andrew (Jamey Sheridan). Il a tout fait pour ne pas payer pour l'éclairage, même s'il avait l'argent pour, et dans cette version, il a abusé sexuellement à plusieurs reprises de Bridget, tandis que sa femme – consciente de ses prédations – attendait son retour dans leur lit. Pendant ce temps, Lizzie est soumise à de violentes altercations avec son oncle John (Denis O'Hare), qui convoite la fortune d'Andrew au détriment du filet de sécurité financière des sœurs Borden. Et pendant ce temps, elle est continuellement menacée d'être envoyée dans un asile pour avoir transgressé le fait d'être une femme qui refuse d'adhérer aux règles énoncées par les hommes.

Le film a été écrit et en production bien avang les abus sexuels de l'automne dernier, alors que l'élément #MeToo de Lizzie était intrinsèquement inscrit dans l'oeuvre, Sevigny dit que la discussion sur les abus l'a amenée à regarder certains thèmes du film sous un angle différent de celui de la conception initiale.

'C'est tellement plus réel !', dit Sevigny à propos des abus sexuels dans le film. 'Ce n'est pas que je ne croyais pas que c'était une vraie chose à dire, mais maintenant, c'est exactement ce qu'elle représente en tant que hors la loi américain qui remet en question le statu quo et les tyrans et les oppresseurs'.

'C'est un film sur la destruction du patriarcat !', explique t-elle.

Même si Lizzie s'attache à détruire le patriarcat, c'est aussi une question de solidarité féminine. Et Sevigny, travaillant avec un budget de film indépendant, attirant l'actrice de premier rang Stewart à s'engager dans le projet était plus qu'un coup.

'Je devais essayer de la séduire', rigole Sevigny. 'J'ai eu son numéro et je lui ai envoyé des SMS à propos de l'histoire et à propos de ce que cela signifiait pour moi et la raison pour laquelle je pensais qu'elle serait excellente pour le rôle'.

Après une réunion dans un café à Los Angeles, Stewart s'est engagée. 'Il y a une admiration mutuelle et elle disait, 'Je veux juste vous aider'', a déclaré Sevigny, ajoutant qu'elle a fait la même chose pour certains de ses amis qui cherchent à lancer des projets.

Borden a été un sujet de fascination culturelle depuis que les meurtres ont été commis. L'histoire a inspiré la céllèbre comptine pour enfants, une revue musicale de Broadway, un ballet, une nouvelle et une série télévisée récente mettant en vedette Christina Ricci, pour ne citer que quelques exemples. Sevigny admet avoir été fascinée par Borden et par les crimes une fois qu'elle a vraiment commencé à creuser le sujet.

'Je pense que cela n'est pas encore résolu et que les gens peuvent projeter toutes leurs idées et les explorer. Tout crime réel, en particulier le crime non résolu, les gens veulent jouer à l'enquêteur', dit-elle au sujet de l'intérêt continu. 'Même lorsque j'ai commencé à faire des recherches – aller dans la maison, lire différents livres, lire des articles de journaux et des transcriptions judiciaires'.

'Je vais trouver la vraie vérité de l'histoire de Lizzie Borden !', a été sa première réaction lors de la découverte des preuves, dit-elle. 'Personne ne saura jamais la vérité !', concède t-elle.

Ce qui a captivé Sevigny et le scénariste Kass, c'est l'idée que parmi les transcriptions, les articles de journaux et les éléments de réflexion de l'époque, il y avait peu d'informations sur ce qui se passait derrière les murs de la maison des Borden. Et le duo en est arrivé à l'idée – la rumeur veut que la vraie Borden ait eu une relation avec l'actrice Nance O'Neil – que Borden n'avait pas seulement eu une complice en Bridget mais que les femmes étaient également amoureuses.

'Il est impossible que Bridget n'ait pas été de mèche !', dit Sevigny. L'actrice et Kass ont pris cette décision après une visite dans la maison des Borden. 'Il est impossible qu'elles n'aient pas pu faire cela ensemble. Et il est impossible que Lizzie n'ait pas été au courant. Il y a deux heures entre chaque meurtre et elles étaient toutes les deux à l'extérieur. Nous avons avancé avec ça. Parmi toutes les autres choses que nous avons lu, parmi toutes les hypothèses et les théories, c'est l'espace réel qui a conduit notre histoire'.

Au-delà de l'écriture de Bridget en tant que complice de Lizzie pour expliquer la logistique des meurtres, Sevigny et Kass ont décidé d'opter pour une histoire d'amour à la célèbre fille célibataire pour mener l'action du film.

'J'avais beaucoup d'empathie envers elle. Elle avait une vie intérieure riche et elle n'avait pas beaucoup de points de vente', dit-elle à propos de Lizzie, dépeinte comme une lectrice avide et une mécène.

'J'ai eu le sentiment que beaucoup de choses en dehors de Fall River changeaient, mais dans cette communauté calviniste, elle était vraiment intelligente. Elle avait beaucoup à dire et personne à qui parler', ajoute Sevigny. 'C'est là que nous voulions établir une relation avec Bridget pour elle – que Bridget soit enfin un exutoire. C'était comme si elle méritait cet amour et une évasion de son horrible existence'.

Au milieu des abus émotionnels que Lizzie subit de la part de son père et des visites au milieu de la nuit qu'il effectue dans la chambre de Bridget pour la violer, les femmes se consolent. Lizzie aide Bridget à lire et à écrire , mais elles commencent à se lancer des regards furtifs et caresser les mains de l'autre en se passant des petits mots dans la cage d'escalier, puis en se libérant sexuellement.

Dans son essai Lethal Lesbians: The Cinematic Inscription of Murderous Desire, l'historien du cinéma B. Ruby Rich écrit des films qui jouent dans le trope lesbien meutrier, comme Heavenly Creatures de Peter Jackson et Sister My Sister de Nancy Meckler (un film que Sevigny dit aimer et dit avoir envoyé à Stewart pour la préparation du film), dans lequel des femmes de chambre incestueuses assassinent leur employeur et sa fille. Dans ces films, le meurtre est la consommation ultime de la relation. Bien que la représentation des meurtres dans Lizzie soit le dénouement du film, Sevigny dit avoir voulu que Lizzie et Bridget aient également une consommation sexuelle.

'Nous voulions leur donner ça. Le film est tellement restreint et tellement coincé. Et vous les voyez à l'écran, ces moments presque touchants et ces sortes de clichés d'histoires d'amour d'époque. Mais ils fonctionnent aussi et ils me titillent également', explique Sevigny. 'Je pense que la façon dont nous avons fait la scène de sexe – nous ne sommes pas nues. Nous sommes toujours confinées dans ces vêtements. Nous avons besoin les uns des autres'.


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