Transcription de l'article:
Au rang des égéries, Chanel brouille les pistes ces
dernières saisons, alternant superstars, it-girls et icônes plus underground
pour ses campagnes mode, parfums ou accessoires. Ainsi a-t-on vu poser Vanessa Paradis
ou Brad Pitt pour un parfum féminin, Keira Knightley, Tilda Swinton, Blake
Lively, Maïwenn Le Besco, Alice Dellal… Et cette fois-ci, Kristen Stewart. À 24
ans, l’actrice américaine – vedette de la saga “ Twilight ” dès 2008 – incarne
la collection métiers d’art Paris-Dallas devant l’objectif de Karl Lagerfeld.
La demoiselle était l’égérie des parfums Florabotanica et Rosabotanica de
Balenciaga depuis 2012. Mais après une dernière campagne début 2014, elle est
partie du côté des deux C.
En
1991, Chanel avait déjà opéré un revirement dans le choix de ses ambassadrices,
avec Vanessa Paradis, 19 ans à l’époque, pour le parfum Coco. C’était la
fameuse pub de l’oiseau de paradis en cage réalisée par Jean-Paul Goude. Et un
choix à contre-courant des publicités de la maison dans les décennies
précédentes, avec des figures comme Catherine Deneuve et Carole Bouquet. Chanel
quittait ainsi ses clichés intimistes et luxueux pour s’offrir de l’onirisme.
Aussi. Et de la jeunesse.
Aujourd’hui,
même combat. La maison de la rue Cambon bouscule les codes avec une Alice
Dellal, moitié du crâne rasée, ou une Tilda Swinton, plutôt prisée par les
artistes ou créateurs hyperpointus. Et flirte invariablement avec la jeunesse
grâce aux icônes adolescentes que peuvent être Blake Lively ou Kristen Stewart.
L’effet “ Twilight ” et magazine people passé, Miss Stewart – habituée des
caméras depuis sa jeunesse – pourrait être promise à une vraie carrière. Elle
est d’ailleurs à l’affiche, avec Juliette Binoche, du dernier film d’Olivier
Assayas, “ Sils Maria ”, justement en compétition au Festival de Cannes cette
année. Et sa collaboration avec Chanel aura sans doute redoré le blason d’une
carrière qu’on jugeait invariablement à ses “ pipolades ” amoureuses.
Chanel et vous, c’est une nouveauté ?
Oh
non, ça date de l’adolescence ! Cette relation avec Karl et Chanel n’a cessé de
grandir en fait. La première fois que j’ai porté une création de la maison,
c’était en 2007, lors de la première de “ Into the Wild ” au Festival
international du film de Toronto. J’avais 17 ans. Après ça, j’étais habillée
par la maison lors de mon premier Met Ball – le fameux gala annuel du
Metropolitan Museum of Art de New York, NDLR –, aux Bafta ou encore durant un
shooting pour le magazine “ Vanity Fair ” où j’ai posé avec Karl devant
l’objectif de Mario Testino. Non seulement c’est un privilège de porter des
créations de Chanel, mais ça l’est aussi de côtoyer Karl. Il est, à mon sens,
un artiste et une éternelle source d’inspiration. Il ne cesse d’aller de l’avant,
sans jamais perdre de vue l’identité de la maison. Et c’est un véritable
honneur de faire partie de la famille Chanel.
Vous vous reconnaissez dans cet univers ?
Je
crois que je ne pourrais pas être l’égérie par excellence de Chanel, portant
des perles et les autres pièces emblématiques de la maison. En tout cas, je ne
me vois pas comme telle. Mais je suis très sensible à la force de cette
collection Paris-Dallas et j’aime l’idée de la façonner et de jouer avec les
looks, pour la rendre originale et unique. C’est un rôle que j’endosse. Cela
dit, cette collection me ressemble sans doute beaucoup plus que les précédentes
parce qu’elle est très américaine. Je n’irais pas jusqu’à utiliser le mot
bad-ass, mais il y a quelque chose d’amusant, voire de sauvage, dans cette
collection qui va droit au but. Non pas que cela ne corresponde pas à ce que
Chanel fait d’habitude, mais il y a sans doute plus d’audace.
Vous voyez des rapprochements entre les univers de
la mode et du cinéma, ou entre un défilé et une cérémonie comme les Oscars, par
exemple ?
Assister
à un défilé, c’est d’abord profiter pleinement d’une expérience. Tout est dans
la musique, dans l’atmosphère qui se dégage du lieu. Un défilé doit transmettre
une émotion. Mais ce n’est pas toujours le cas : parfois, cela se résume
uniquement à des vêtements. Par contre, quand un défilé, son décor et sa mise
en scène vous racontent une histoire, là vous rentrez dans l’univers du cinéma.
C’est comme regarder un film ! Assister à un défilé réussi, c’est comme être témoin
d’un moment historique, vous savez que quelque chose d’unique est en train de
se produire. J’ai assisté à deux défilés Chanel et, à chaque fois, c’était une
expérience incroyable qui allait bien au-delà des vêtements et du choix des
robes. C’était un tout, comme si vous regardiez une histoire se dérouler sous
vos yeux.
Vous retrouvez cette énergie sur les plateaux de
tournage ?
Si
je fais ce métier, c’est pour pouvoir être au plus près de cette énergie. Même
si je n’appartiens pas au monde de la mode, que je ne crée pas de vêtements, je
veux ressentir cette énergie créatrice. Lorsque vous vous trouvez sur un
plateau de cinéma et que la magie opère, elle est là. C’est comme si vous étiez
témoin d’un miracle. Vous n’y êtes pour rien, vous ne pouvez pas le contrôler,
ça arrive, c’est tout. Et tout est là.
Pas banal pour Chanel de défiler au Texas. Ce défilé
Paris-Dallas vous a inspirée ?
Nous
étions tous des pièces rapportées ! Aucun de nous n’était originaire de Dallas
ou du Texas. C’est comme si nous avions tous été téléportés non seulement dans
un autre endroit, mais aussi dans un autre espace-temps. Inutile d’aller
chercher très loin pour trouver des points communs entre cet univers et le
mien, du coup !
Mais Paris et Dallas, ça fonctionne ?
Chanel
est la marque française par excellence et elle puise ici son inspiration dans
l’art et l’histoire, y ajoute un chapeau de cow-boy et le tour est joué !
Personne n’aurait pu croire que cela fonctionnerait et pourtant ils ont
assuré ! Ce n’est pas seulement une maison chic, raffinée et élégante, c’est
aussi un univers terriblement cool et dans l’air du temps.
Et pendant ce shooting, vous étiez impressionnée par
Karl Lagerfeld ? On vous sent admirative…
Il
est né pour faire ce qu’il fait, pas seulement dans la mode, mais aussi dans
l’art en général. Si les gens sont intimidés par lui, ce n’est pas pour ce
qu’il dégage, mais pour ce qu’il a accompli et pour tout ce qu’il représente.
Pourtant, quand vous faites sa connaissance, il est tout sauf intimidant. Il
fait partie de ces vrais artistes, ceux qui ont choisi de faire ce qu’ils
aiment, qui ont besoin de le faire et y prennent du plaisir. J’ai toujours rêvé
de travailler avec de telles personnes : créer des choses avec des gens qui
sont doués dans ce qu’ils font. Dans ce domaine, vous ne pouvez pas trouver
mieux que Karl Lagerfeld ! J’ai réalisé pendant le shooting que si quelque
chose vous demande trop d’efforts, c’est probablement que vous n’êtes pas fait
pour ça. Aujourd’hui, tout m’a paru si naturel, facile. D’un simple coup d’œil,
il savait exactement ce qu’il voulait. Tout s’est fait sans effort, de manière
très fluide. C’est fabuleux.
Que retenez-vous de cette séance photo ?
Cette
idée de Karl, de ce qu’il a accompli, le rôle qu’il s’est créé en société et
dans le monde des arts. Il paraît sans doute intimidant pour les gens qui ne le
connaissent pas et qui s’imaginent qu’il est inaccessible. Mais dès que vous le
rencontrez et que vous avez la chance de le regarder travailler ou, dans mon
cas, de travailler avec lui, vous réalisez à quel point il est incroyable. Et
vous vous enrichissez au contact d’un tel puits de connaissance, si créatif,
insatiable et enthousiaste. J’ai été impressionnée par l’étendue de son talent
de photographe. Et j’ai surtout pu constater à quel point il aime ce qu’il
fait. De toute évidence, il est par essence bien plus qu’un créateur de mode :
c’est un véritable homme de savoir, l’un des plus grands artistes de notre
époque.
Vous pouvez retrouver l'article ICI.
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